Loi ESSOC : solution d’effet équivalent et impacts en matière de sécurité incendie

8 septembre 2021

Loi ESSOC : solution d’effet équivalent et impacts en matière de sécurité incendie

La loi ESSOC constitue une réécriture du code de la construction. Quels sont les impacts concernant la sécurité incendie ?

Théo Norme propose de revenir sur les évolutions majeures induites par la réécriture de la partie législative du Livre premier du Code de la construction et de l’habitation (CCH) et d’analyser l’impact de la réécriture imminente de la partie réglementaire de ce même livre, notamment en matière de sécurité incendie.

Loi ESSOC : réécriture du code de la construction

L’article 49 de la loi n°2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance, dite « ESSOC » s’est fixé un objectif ambitieux :  la réécriture intégrale du livre premier du CCH.

Après avoir introduit un dispositif transitoire de « permis d’expérimenter », par une ordonnance n°2018-937 du 30 octobre 2018 dite ESSOC I, le gouvernement a entendu intégrer de manière durable dans le CCH, par une seconde ordonnance n° 2020-71 du 29 janvier 2020 dite « Ordonnance ESSOC II », le mécanisme des solutions d’effet équivalent et procéder à la réécriture de la partie législative du livre premier du CCH. Cette ordonnance est entrée en vigueur le 1er juillet 2021, abrogeant ainsi l’ordonnance ESSOC I.

Ensuite, afin d’assurer la cohérence entre les parties législatives et réglementaires du CCH, le décret du 30 juin 2021 a recodifié la partie réglementaire du Livre I du CCH, à droit constant : seule la numérotation des dispositions réglementaires a évolué.

La prochaine étape majeure, qui constitue en une réécriture de certains de ces textes recodifiés par le décret du 30 juin 2021, sera initiée par un décret à venir.

Ce décret portera notamment sur la mise en œuvre des mesures d’effet équivalent en matière de sécurité incendie.

Ordonnance ESSOC II : La solution d’effet équivalent, grande innovation du CCH remodelé

A compter du 1er juillet 2021, le dispositif de solution d’effet équivalent pourra être mis en œuvre dans tous les domaines, là où l’ordonnance « ESSOC I » limitait sa mise en œuvre à des domaines particuliers, désignés par décret.

Pour chaque règle de construction, les dispositions législatives du CCH fixent des objectifs généraux à atteindre. Il convient alors de distinguer deux hypothèses :

  • Les objectifs généraux sont assortis de résultats minimaux : l’atteinte de ces résultats devra être prouvée selon les modalités fixées par les dispositions réglementaires propres à chaque champ technique (sécurité incendie, attestation acoustique, RE 2020 …) ;
  • La règle générale ne s’accompagne pas de résultats minimaux : le maître d’ouvrage peut recourir à deux procédés pour justifier du respect de cette règle :
  • Il peut recourir à une solution de référence, définie par voie réglementaire (par exemple le règlement de sécurité incendie) ;
  • Il peut recourir à une solution d’effet équivalent (SEE) en justifiant celle-ci respecte les objectifs généraux et permet d’atteindre des résultats au moins équivalents à ceux de la solution de référence à laquelle elle se substitue.

La procédure de mise en œuvre des SEE se déroule en plusieurs étapes :

  • Avant le dépôt de l’autorisation d’urbanisme (déclaration préalable, permis de construire, demande d’autorisation de créer, d’aménager ou de modifier un établissement recevant du public…) le maître d’ouvrage doit déposer un dossier auprès des organismes visés à l’article R.112- 4 du CCH, à savoir :  les contrôleurs techniques, Le centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement la mobilité et l’aménagement (CEREMA) et le Centre Scientifique et technique du Bâtiment. L’organisme tiers visé par le CCH, qui n’est pas considéré comme un constructeur au sens ce code, doit souscrire une assurance couvrant sa responsabilité civile.
    • Après analyse du dossier, cet organisme délivrera une attestation de respect des objectifs ;
    • Ensuite, après la mise en œuvre de la SEE, un second organisme, qui ne pourra être celui ayant délivré la première attestation, contrôlera la mise en œuvre de cette solution et délivrera une attestation de bonne mise en œuvre.

Il convient de noter qu’en matière de sécurité incendie, seuls les organismes accrédités « SEE » pourront délivrer les attestations de respect des objectifs. Cette disposition n’entrera toutefois en vigueur que lorsque les modalités et les conditions d’obtention de cette accréditation spécifique auront été fixées par arrêté devant intervenir avant le 1er janvier 2024.

Dans l’attente, sont reconnus compétents pour exercer la mission de délivrance de l’attestation de respect des objectifs :

  • Pour la résistance au feu, les laboratoires agréés au titre de l’article R.* 141-5 du code de la construction et de l’habitation,
  • Pour le désenfumage, les organismes reconnus compétents par le ministre de l’intérieur, en application des dispositions prévues à l’article DF4 du règlement de sécurité contre les risques d’incendie et de panique dans les établissements recevant du public approuvé par arrêté du 25 juin 1980.

Réécriture imminente de la partie réglementaire : introduction de nouvelles dispositions dédiées à la sécurité incendie dans la loi ESSOC

Un projet de décret d’application de l’ordonnance « ESSOC Il » a été soumis à la consultation publique cet été. Ce décret initie le processus de réécriture de la partie réglementaire du livre premier du CCH et vise à permettre une meilleure identification de la nature des règles constructives (résultats minimaux ou obligations de moyen).

L’article 6 du projet de décret introduit des nouvelles dispositions dans le titre IV, dédié à la sécurité incendie.

Il est ajouté une nouvelle section II « Exigences fonctionnelles ». Ces exigences sont définies comme « les qualités de l’ouvrage devant être vérifiées en cas de recours à une solution d’effet équivalent en matière de sécurité incendie. En application de l’article L. 141-3, la justification de respect des objectifs prévue au c) du 2° de l’article R. 112-2 est apportée par une étude d’ingénierie de sécurité incendie qui établit que les exigences fonctionnelles fixées aux articles R. 141-15 à R. 141-20 sont satisfaites. »

 Il s’agit d’une modalité de mise en œuvre des SEE spécifique au domaine de la sécurité incendie. Toutefois, ces dispositions n’imposent pas de nouvelles contraintes en la matière.

Enfin, on notera que le projet de décret initie le transfert de certaines dispositions du Code du travail vers le CCH, dont celles relatives à l’ambiance thermique du bâtiment. Ce transfert, ainsi que ceux qui suivront en matière de sécurité incendie et d’accessibilité aux personnes en situation de handicap, notamment, entreront en vigueur le 1er janvier 2022.

Conclusion

Le processus de réécriture de la partie réglementaire du CCH, initié par le projet de décret qui devrait être publié d’ici la fin de l’année 2021 et qui introduit des nouvelles dispositions en matière de sécurité incendie, sera approfondi dans le cadre de décrets à paraître, dédiés à des domaines particuliers dont celui de la sécurité incendie.  


F.A.Q

Pourquoi le Code de la construction et de l’habitation  a-t-il été réécrit ?

Le Livre Ier de partie législative du CCH a été réécrit dans un objectif de simplification et de clarification des règles constructives. Les nouvelles dispositions du CCH substituent une logique de résultats à atteindre à la logique de moyens qui prévalait jusqu’à présent.

Quels sont les principales nouveautés de cette réécriture ?

La possibilité de recourir à une solution d’effet équivalent (SEE) est désormais prévue par le CCH. Le maître d’ouvrage doit pouvoir justifier que la solution technique respecte les objectifs généraux fixés dans un champ technique. Pour ce faire, il doit disposer, avant la mise en œuvre de SEE d’une attestation de respect des objectifs délivrée par un organisme tiers, qui sera jointe à la demande d’autorisation d’urbanisme. La bonne mise en œuvre de cette solution sera vérifiée, dans un deuxième temps, par un autre organisme.

Quels sont les organismes compétents pour délivrer l’attestation de respect des objectifs en matière de sécurité incendie ?

A terme, seuls les organismes accrédités « SEE » pourront délivrer les attestations de respect des objectifs. Dans l’attente de la publication de l’arrêté fixant les modalités et les conditions d’obtention de cette accréditation, sont reconnus compétents pour exercer la mission de délivrance de l’attestation de respect des objectifs :

  • Pour la résistance au feu, les laboratoires agréés au titre de l’article R.* 141-5 du code de la construction et de l’habitation,
  • Pour le désenfumage, les organismes reconnus compétents par le ministre de l’intérieur, en application des dispositions prévues à l’article DF4 du règlement de sécurité contre les risques d’incendie et de panique dans les établissements recevant du public approuvé par arrêté du 25 juin 1980.